Lors d’une réunion avec le gouvernement vendredi dernier au château de Senningen, la CGFP, le LCGB et l’OGBL ont exprimé leur mécontentement face à l’extension prévue du CovidCheck sur le lieu de travail. La coalition gouvernementale fait actuellement avancer ce dossier en cavalier seul, sans vraiment avoir consulté les 3 syndicats représentatifs au niveau national. Les représentants salariaux ont été pris à froid et mis devant le fait accompli. L’exécutif se comporte comme si le Luxembourg se trouvait toujours en état d’urgence.
Dès le début de la réunion avec les ministres Dan KERSCH, Marc HANSEN et Paulette LENERT, les représentants syndicaux ont clairement indiqué qu’ils ne s’opposent nullement à la campagne de vaccination gouvernementale et qu’ils soutiennent une vaccination sur une base volontaire. Toutefois, l’objectif ne devra en aucun cas être de rendre la vie infernale aux personnes non vaccinées afin d’augmenter le taux de vaccination, pour le meilleur ou le pire.
Le gouvernement s’en lave les mains
Avec son approche contre-productive, le gouvernement est de plus en plus empêtré dans des contradictions. Au début de la pandémie, il s’opposait explicitement à une vaccination obligatoire. Entre-temps, il exerce une certaine pression sur les citoyens qui, pour une raison quelconque, n’ont pas utilisé ce vaccin protecteur. Au final, la vaccination obligatoire est introduite par la petite porte.
Au lieu d’analyser atrocement les erreurs commises lors de la lente campagne de vaccination et de les corriger en conséquence, le gouvernement préfère refiler la responsabilité aux chefs d’administration et d’entreprise.
Pénurie de personnel dans les secteurs essentiels
Le projet du gouvernement suscite une incompréhension croissante dans le monde professionnel et pourrait mettre en péril la paix sociale. Les 3 syndicats se voient déjà confrontés à une ruée de salariés désespérés craignant pour leur emploi. La coalition politique à 3 risque de devenir incapable d’accomplir ses obligations : En face de nombreux salariés qui pourraient se voir refuser l’accès au lieu de travail, une pénurie de personnel dans les secteurs essentiels de notre société ne peut pas être exclue.
Pourtant, le CovidCheck, que les employeurs et les chefs d’administration peuvent introduire à leur propre volonté à partir du 1er novembre 2021, soulève de nombreuses questions. Quelles sont les conséquences pour un salarié, qui ne veut pas se faire vacciner et qui n’est pas non plus en mesure de payer les tests coûteux ? Ces cas seront-ils considérés comme refus de travail, entraînant des sanctions sévères et éventuellement un licenciement ? Pourquoi le gouvernement refuse-t-il d’envisager des solutions alternatives pour les opposants au CovidCheck (distanciation sociale, port de masque…) ? Vendredi dernier, les ministres responsables n’ont pas répondu à toutes ces questions.
« Solidarité vivée » mise à l’épreuve
La CGFP, le LCGB et l’OGBL sont convaincus que dans un État de droit, personne, sur base de ses convictions, ne devra être traité comme citoyen de seconde classe. Le gouvernement se vante que le Luxembourg ait récemment été admis au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies. Il serait regrettable d’accompagner cette honorable première par un faux départ.
À l’occasion de son discours sur l’état de la nation, le Premier ministre s’est vanté que son gouvernement n’avait abandonné personne pendant la crise COVID-19 toute en faisant preuve d’une « solidarité vivée ». Pourtant quelques jours plus tôt, Bleu-Rouge-Vert n’avait pas hésité à présenter un projet de loi qui risque de mettre en péril les existences de milliers de personnes.
Alors que les hauts-salaires peuvent facilement payer les tests certifiés et surfacturés, qui seront exigés, cela pourra engendre une charge financière importante pour de nombreux salariés. Cette discrimination inacceptable va créer de nouveaux problèmes sociaux. L’abrogation des tests rapides gratuits doit être annulée immédiatement. Selon le Code du travail, les coûts des mesures garantissant la sécurité et la santé au travail ne doivent pas incomber aux salariés. Par conséquent, les frais des tests doivent être à charge de l’employeur s’il introduit le 3G comme mesure de protection.
En outre, le plan précipité laisse des points essentiels non résolus. Au sein des administrations ou entreprises, qui emploient un grand nombre de personnes, quelles sont les procédures pratiques des contrôles. Il faudra de nombreuses clarifications quant au rôle de la délégation du personnel.
Pour plus de 150 employés, la délégation du personnel doit donner son accord à un CovidCheck. Cependant, le rapport inégal entre la direction et les délégations du personnel signifie un désavantage clair pour les représentants des salariés. Les délégations doivent en outre jour un rôle plus important dans les petites et moyennes entreprises. Compte tenu de l’effort quotidien important, il ne faut pas s’étonner que le CovidCheck soit peu apprécié, notamment dans certaines grandes entreprises.
Incertitude juridique avec conséquences imprévisibles
Avec l’introduction du concept 3G sur le lieu de travail, la coalition politique à 3 patine sur une glace très mince, tant sur le plan juridique que sur celui de la protection des données. Le projet de loi immature a été rédigé à la hâte sans avoir créé un cadre juridique clairement défini. Il est à craindre que, dans de nombreux cas, le climat social au travail déjà en crise soit encore alimenté par une avalanche de procès.
Le texte ne contient pas non plus d’informations quant à des éventuelles sanctions, ce qui laisse la porte ouverte aux abus. Les décideurs politiques se réfèrent uniquement au statut public ou au droit du travail. Dans la pratique, cela signifie toutefois que le chef d’une administration ou l’employeur décidera au cas par cas les conséquences d’un refus du CovidCheck. Ainsi, des sanctions arbitraires de l’employeur contre les salariés impopulaires sont encouragées comme jamais auparavant.
Actions en justice non exclues
Pour toutes ces raisons, les 3 syndicats représentatifs au niveau national font appel aux députés de tous les partis à rejeter l’article du projet de loi sur le CovidCheck au travail lors d’un vote séparé demain.
Si le projet de loi est adopté sans modification et que la coalition politique ne montre aucune volonté de compromis d’ici le 31 octobre 2021, la CGFP, le LCGB et l’OGBL engageront de nouvelles actions syndicales et juridiques.
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