Le Gouvernement doit revoir sa position !

Le projet de loi « 7024 », visant à mettre en œuvre certaines dispositions du règlement (UE) 2015/751, va aussi procéder à des ajustements dans plusieurs lois, dont l’article 41 de la loi modifiée du 5 avril 1993 relative au secteur financier. Cet article qui concerne le secret professionnel dans le secteur financier sera en effet modifié dans le sens d’une facilitation de l’externalisation de services.

Le LCGB est fortement préoccupé par cette révision de l’article 41 et est stupéfait devant la décision du Gouvernement d’aller beaucoup plus loin que ce que la règlementation européenne impose à ce niveau.

Dans le cadre de plusieurs restructurations importantes dans le secteur financier qui ont eu lieu ces dernières années, le LCGB a été heurté par la facilité avec laquelle certaines entreprises ont pu délocaliser des pans entiers d’activités vers des pays à salaires plus bas. Les  conséquences sociales de ces délocalisations se sont concrétisées par des plans de suppression d’emplois brutaux. Aujourd’hui, le Gouvernement décide de donner encore un coup d’accélérateur à ce processus !

Le nouveau paragraphe 2bis de l’article 41 introduira désormais certaines exceptions au secret professionnel :

  • La communication d’informations confidentielles à des entités établies au Luxembourg et qui sont surveillées par la CSSF, la BCE ou par le Commissariat aux Assurances, dans le contexte d’un contrat de services.
  • En cas de sous-traitance « intragroupe », et si la personne protégée par le secret est informée que les informations confidentielles la concernant font l’objet d’une sous-traitance (le sous-traitant doit être une entité du groupe et être soumis à une obligation légale de secret professionnel ou être lié à l’entité luxembourgeoise par un engagement contractuel de confidentialité).
  • En cas de sous-traitance « extra-groupe », lorsque la personne protégée par le secret professionnel a accepté, au préalable et par écrit, la sous-traitance des services sous-traités, le type de renseignements transmis dans le cadre de la sous-traitance et le pays d’établissement des entités prestataires des services sous-traités (tout comme pour la sous-traitance intra-groupe, le sous-traitant doit être soumis à une obligation légale de secret professionnel ou être lié à l’entité luxembourgeoise par un engagement contractuel de confidentialité).

En introduisant ces nouvelles exceptions qui permettront désormais le transfert de données des clients à des prestataires de service étrangers, le Gouvernement menace clairement un nombre très important d’emplois au Luxembourg, notamment en ce qui concerne les activités de support technique et informatique.

Ce risque de pertes d’emplois massives concerne tant les banques elles-mêmes, que les sociétés de fonds ou encore les Professionnels du Secteur Financier (PSF).

De nombreuses activités des banques telles que la gestion administrative et informatique de la clientèle, la comptabilité,… pourront encore plus facilement être effectuées dans d’autres pays. Et vu qu’il sera à l’avenir possible que les prestations actuellement fournies soient remplacées par des prestations à fournir par des prestataires étrangers, l’emploi dans les 77 PSF de support et les 125 PSF spécialisés (comptant environ 13.000 emplois) est concerné !

Pour relativiser les effets (pourtant connus) de son projet de loi, le Gouvernement espère qu’en contrepartie, la place financière luxembourgeoise sera rendue plus attractive, notamment pour des banques établies à Londres et qui, suite au Brexit, chercheront à se réimplanter sur le marché européen. Actuellement, une telle évolution est cependant loin d’être acquise dans la mesure où ce sont principalement des petites structures qui seraient tentées de venir s’établir au Grand-duché et non des grands établissements.

Pour le LCGB, par rapport à ce projet de loi, il y a visiblement plus de certitude quant à la menace qui pèse sur de très nombreux emplois que quant à la création de potentiels nouveaux emplois.

Il est certes essentiel de s’adapter aux évolutions technologiques et d’anticiper les diverses mutations que connait le secteur financier. Mais pourquoi le Gouvernement  décide-t-il ainsi d’aller plus loin que ce qui est prévu par les règlements européens ? Pourquoi balaye-t-il de la sorte les gages qui étaient donnés jusqu’ici par le cadre strict de l’agrément « PSF » ? Pourquoi aller aussi vite pour implémenter de telles dispositions (dont les risques dramatiques en termes d’emploi sont connus) et ne pas laisser aux acteurs et aux salariés du secteur plus de temps pour se préparer ?

Le LCGB appelle le Gouvernement à corriger le texte proposé afin d’éviter une catastrophe sociale qui pourrait coûter des milliers d’emplois dans le secteur financier.

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