« Adaptabilité de l’âge de départ en retraite », tel est le sujet de la première réunion d’experts dans le cadre de la consultation sur le système des pensions au Luxembourg.
C’est pourtant Martine DEPREZ, Ministre de la Santé et de la Sécurité sociale, qui avait affirmé quelques mois plus tôt, lors de l’un des nombreux « teasers » maladroits dans la presse, qu’elle n’entendait pas toucher à l’âge de départ en retraite. Est-ce que la ministre a soudainement changé de cap ? Non, il semble qu’il s’agit tout simplement d’une manœuvre politique bien coordonnée.
En y regardant de plus près, la farce qui se déroule actuellement sous le prétexte de consultations autour d’une possible réforme des pensions devient encore plus évidente. Les trois syndicats justifiant de la représentativité nationale, l’OGBL, le LCGB et la CGFP constatent que les réunions d’experts, censées être un espace de dialogue constructif, ne sont en réalité qu’un spectacle orchestré dont le scénario semble écrit d’avance. Tout est bien rôdé : acteurs bien choisis, dialogues calibrés, et surtout un résultat final qui semble déjà gravé dans le marbre.
En plaçant différents « experts » qui ont été choisis de façon arbitraire sur un pied d’égalité avec les syndicats, le gouvernement piétine une fois de plus le modèle du dialogue social luxembourgeois en mettant sérieusement en péril la paix sociale. Ce modèle, qui a permis au fil des décennies de bâtir un système de pension solide et équilibré, est aujourd’hui décomposé systématiquement dans le seul but de l’affaiblir.
Rappelons que la gestion de la caisse de pension, tout comme les autres caisses de la Sécurité sociale, repose sur un principe fondamental : la cogérance par les partenaires sociaux. Le nombre de représentants du côté salarial au sein des différents conseils d’administration est déterminé par deux élections démocratiques, celle de la Chambre des salariés et celle de la Chambre des fonctionnaires et employés publics. En refusant à ces mêmes partenaires sociaux d’inviter leurs principaux représentants chargés au quotidien de la gestion de la Sécurité sociale, le gouvernement cherche délibérément à diluer la voix des syndicats en essayant de les marginaliser.
La trame des discussions confirme cette impression. En centrant la première réunion sur « l’adaptabilité de l’âge de départ à la retraite », la ministre ignore tout simplement la note des syndicats sur le système des pensions, publiée et présentée en octobre 2024, qui a prouvé que relever l’âge de la retraite ne résout en rien les enjeux de la pérennité financière du système des pensions. Un élément qui a d’ailleurs été confirmé par l’IGSS dans son rapport technique de 2022.
De plus, l’OGBL, le LCGB et la CGFP mettent sérieusement en question que la consultation publique en ligne « Schwätz mat » aurait conduit aux sujets des réunions d’experts. Nous rappelons que près de la moitié des participants avaient exprimé leur soutien aux positions défendues par les syndicats. Pourtant, ces opinions sont étrangement absentes du choix des thématiques discutées. Étrange hasard, ou stratégie politique bien réfléchie ?
Or, la note de préparation du gouvernement en vue des échanges ne s’arrête pas là. Dans sa tentative d’orienter les discussions dès le début, le gouvernement ose avancer des arguments fallacieux, comme l’idée que travailler plus longtemps serait favorable à la santé des salariés. Une déclaration qui d’un côté ne devrait absolument pas figurer dans un document censé être neutre et qui est surtout démentie par de nombreuses études, qui prouvent au contraire les effets néfastes d’une prolongation de la vie active sur la santé physique et mentale des salariés.
En clair, le gouvernement cherche à nous vendre une histoire bien ficelée en limitant fortement le poids des partenaires sociaux pour mieux valider des conclusions écrites dès le premier acte. L’OGBL, le LCGB et la CGFP dénoncent cette mascarade politique qui ne vise qu’à affaiblir les acquis sociaux des salariés.
Le modèle luxembourgeois du dialogue social, fondé sur la concertation et la responsabilité partagée, ne peut être sacrifié sur l’autel d’une politique biaisée et déconnectée des réalités des salariés.
Communiqué par l’OGBL, le LCGB et la CGFP,
le 14 mars 2025